La terra incognita, la belle Turquie. On a grand ouvert nos chacras pour ne pas perdre une miette de ce pays. Cet article s'est fait attendre, alors on a coupé l'introduction. Récit de notre épopée turque.


Istanbul est encore loin et déjà là frénésie de la ville se fait sentir. Des buildings, comme on est peu habitué à en voir, s'élèvent entre les autoroutes qui s'entrelacent. La périphérie de la ville est effrayante, la circulation est dense et les automobilistes turcs de vrais dangers publics. Notre GPS ne répond plus de rien, se perd et nous avec. On croise les doigts et on y va à l'instinct pour trouver le parking qui sera notre point de chute pendant notre séjour stambouliote. On peut vous en parler d'ailleurs de ce fameux parking. À première vue un endroit pas franchement avenant, plutôt glauque, mais qui s'est avéré être un véritable lieu de vie, un drôle de quartier dont nous étions désormais les nouveaux habitants. Tout au long de la journée, on pouvait y voir un étrange ballet. Le matin, les hobos du quartier venaient y manger quelques fruits, fumer beaucoup de clopes et dormir à l'ombre des arbres. Ensuite, c'était l'arrivée des nouveaux camping-caristes. L'après-midi était plutôt creuse, jusqu'à l'arrivée des pêcheurs de sardines, encore en costume-cravate, alignés en masse sur le front de mer puis celle des familles cuisinant les braises, en attendant le chant ultime de la journée pour rompre le jeûne, ramadan faisant. À se demander si leur religion n'était pas celle du barbecue. Les plus festifs, increvables, restaient jusqu'au bout delà nuit se déhanchant sur des musiques traditionnelles, donnant le change à la prière de l'imam de 5 heures du matin. Au bout de trois jours, nous avions changé de voisins et nous étions désormais les plus vieux résidents du parking, exception faite de la famille de romanichel, bailleur à l'année d'une camionnette blanche sans roues, engagée pour surveiller le parking et vendre du thé au black dans le square. Bon, on oublie quand même le principal atout de cet endroit, qui était d'être à deux pas de l'hypercentre d'Istanbul et qui nous a permis de visiter aisément la ville.



D'un point de vue global, Istanbul nous a charmé. La vieille ville plus traditionnelle nous a conquise par ses belles et imposantes mosquées. Dans ses ruelles typiques s'échappent un air d'antan. On n'a bien sûr pas pu échapper à l'itinéraire touristique de la grande Sophie, à la mosquée bleue et celle de sulimane le magnifique jusqu'au palais de Topkapi, au grand bazar et au marché aux épices, décevant. Plus que ces grands lieux majestueux, certe, c'est l'atmosphere de la ville qui nous a séduit, ses petits marchands, ses saveurs d'orient, sa culture et sa personnalité. On a aussi trouvé notre compte dans l'Istanbul moderne, quartier plus europeanisé, à déambuler dans le quartier des antiquaires et des petits designers qui réinterprètent avec goût les savoirs -faire millénaires. On a terminé notre visite de la ville par une croisière de quelques heures sur le bosphore pour admirer les mosquées, palais et hôtels de charme donnant sur la mer. Ce n'est que sur ce bateau à quelques heures du départ que l'on s'est rendu compte de l'immensité de la ville et qu'on avait bien dû en louper les trois quarts.


Nous avons amorcé ensuite notre descente dans le sud du pays vers Bursa où nous nous sommes laissés tenter dans son incroyable marché, par des montagnes de fruits juteux, des fruits secs et loukoums à outrance, des olives au goût délicieux en autres. De quoi prendre des forces pour rejoindre Izmir puis Çelsuk encore à quelques heures de route de là. Nous avons remonté le temps dans le site d'Éphèse. Le site archéologique est époustouflant. Son état de conservation est remarquable et nous replonge à l'âge d'or de cette cité antique. La chaleur assommante nous a poussé à nous mettre au frais chez un sympathique marchand de tapis où après un déballage complet de la boutique et une rapide négociation, nous faisions notre première acquisition d'un magnifique killim. À nouveau dehors, nous nous sommes mis à nouveau en quête d'une oasis. En Turquie les plages sont presque toutes payantes et les distances sont longues, ce qui a mis notre moral à rude épreuve. Heureusement nous nous sompes échoués sur des plages comme celle de Patara où nous avons campé sous les pins avec vue sur les dunes de sables et les 14km de plage sauvage déserte. Le temps d'une matinée nous avons laissé notre Jeannot pour une petite bicoque à moteur tout aussi bruyant, tout aussi vieux et tout aussi lent pour un tour au large de l'île de kekova. Au programme, ruines englouties et baignades dans les eaux transparentes de la baie. Nous avons quitté la côte sud après avoir largement profité de ses plages aux tortues sans pour autant en avoir vu, direction le centre de la Turquie où un colis bien spécial en provenance de France doit arriver. Nous jouons la montre et profitons de notre avance pour passer une soirée dans la ville d'Antalya, découvrir le magnifique site de thermessos ainsi que la vallée d'Ilhara et ses églises rupestres creusées dans les falaises. Nous avons enchaîné les joyeuses rencontres près d'un lac au milieu de nulle part. Ahmed, quinqua curieux, est venu à notre rencontre puis c'est au tour de Ramazan de nous offrir le traditionnel çay en nous invitant le lendemain chez eux pour le petit déjeuner. Ses seules indications une montagne qu'il nous a montré du doigt, le nom d'un village et la photo d'une maison au volet bleu. Nous finissons la soirée avec la famille de Youssouf qui nous a invité à partager leur barbecue et se sont montrés curieux malgré la barrière de la langue. Autant vous dire qu'on est parti se coucher vers minuit sans avoir pu finir notre partie de Scrabble entamée à 18h.



C'est le ventre bien plein que nous avons repris la route le lendemain après avoir partager bien plus qu'un festin chez nos amis Turcs rencontrés la veille. Notre arrivée à goreme s'est fait dans l'impatience, jusqu'à l'arrivée de deux petites têtes bien connues, Caroline ma sœur et son amie Barbara. Pause de 5 jours à Göreme pour visiter les environs et profiter de ces réjouissances familiales. Durant cette semaine on a crapahuté, beaucoup, traîné aussi nos carcasses, parfois. On a parcouru la vallée aux roses et celle aux pigeons, monté vers le kale d'Uchisar, admiré les cheminées de fée, ces gros pénis de pierre, fouiner chez les antiquaires d'Ortahizar, dévalisé les boutiques de tapis, joué à cache cache dans les villes souterraines, s'extasié devant les fresques des églises rupestres et mangé beaucoup trop, mais goûté à tous. On a rencontré des spécimens et on a raconté beaucoup, beaucoup de conneries. On a trimballé nos deux aventurières vite converties aux joies de la route aux quatres coins de la Capadocce à l'arrière de notre engin, secouées comme des pruniers mais jamais rassasiées par tant de beauté. On a chouiné tous ensemble au moment de se quitter mais ce qui est dit est dit, rendez-vous en Ouzbékistan.



Nous entamons désormais une traversée digne de la diagonale du vide dans le but de profiter de quelques jour sur les rives de la mer noire et rejoindre notre prochain pays la Géorgie. Rien que des étendues de terres à perte de vue. Deux jours de voitures, le temps d'admirer les paysages changeants qui défilent. C'est çà la Turquie, des tableaux qui évoluent non pas au fil des saisons mais aux fils des kilomètres. C'est aussi une terre d'accueil où nos amis les Turcs n'ont cessé de nous surprendre. Alors on en repart grandi et converti pour Tony. Les Turcs n'ont pas résisté à l'envie de lui faire prononcer la phrase sacrée !