À l'approche de la ligne géorgienne, on rechigne à passer la frontière. Il faut dire que nous avons eu tellement de bons moments et de rencontres chaleureuses en Turquie que l'idée de quitter ce pays ne nous enchante pas. La météo maussade n'aide pas. Ici, les visages changent, c'est plus dur, c'est plus rustres, c'est plus froid. On a quand même réussi à franchir le pas. Un tampon de plus dans la collection des visas et nous étions lancés à la découverte de ce petit pays. Trois semaines qui ont défilé autant que les kilomètres, car en Géorgie rien n'est simple, tout est histoire à un détour.


Délaissée rapidement de la première mission de trouver une assurance, nous fonçons voir le quart de finale de la coupe du monde dans la ville de Batumi. Une victoire et une arnaque à la bière plus tard, nous échouons dans un petit camping de "charme". Il faut entendre par charme, une douche en bambou bancale en plein air et des toilettes douteuses, mais tout ça face à la mer. Nous nous accordons deux jours de pause. Les jours sans camion font du bien. Il faut l'avouer, 100 km dans le camion paraissent 300, le bruit du moteur couplé à la musique et à notre clim espagnole, fenêtres ouvertes, font du cerveau, un chamallow. D'autant plus que cette traversée de la Géorgie n'allait pas être de tout repos.


Les géorgiens sont les pires cons-ducteurs auxquels on a eu affaire. Nous nous faisons doubler en plein virage, et ça a longueur de temps. On ne compte plus les face-à-face éviter in extremis, les queues de poissons forçant a nous rabattre sur le bas côtes mais aussi toutes les insultes made in France qui ont fusé dans le camion. En plus de côtoyer sur la route de vrais chauffards, on n'a pas été aidé par l'état des routes. On hésite encore entre ici ou l'Albanie pour décerner une médaille des pires routes du trajet. On touche du bois pour la suite. Des nids de poules de la taille d'impact d'obus, des routes qui se transforment instantanément en chemin sur plusieurs mètres, autant de cailloux que de bouses de vache. Jeannot souffre, couine, mais s'en sort à merveille. Pour la peine, nous lui offrons une nouvelle paire d'amortisseurs Mercedes après avoir traversé le pays d'ouest en est avec quelques détours du nord au sud.



À notre arrivée dans le pays, on a constaté que la Géorgie est un pays vert ! Une oasis après la longue traversée de la région aride de l'est de la Turquie. De la verdure de partout et qui varie selon les régions. De la plantation de thé frontalière, aux bananiers tropicaux, jusqu'aux épineux de montagne. La multiplicité de plantes n'est pas s'en rappeler certaines îles équatoriales. L'air marin sur la côte de la mer noire, est chaud et humide. Il appelle à la baignade, mais les plages ne sont pas aménagés pour pouvoir en profiter. On trouve quand même refuge sous les pins quelques kilomètres plus loin après de Batumi, ravis.


Nous poursuivons avec l'idée entêtante de trouver un lieu pour nous rafraîchir. Les journées sont chaudes et nos corps liquéfiés peinent à se mouvoir. Nous trouvons refuge au canyon de Martvili où l'on découvre avec bonheur une jolie cascade à l'eau glaciale. Après avoir repris vigueur, nous nous mettons en route à la recherche d'un lieu de campement pour la nuit. Sur notre chemin, nous faisons la connaissance de Giulia et Peter un couple russe qui nous propose de rejoindre à eux pour le dîner. Nous poursuivons la soirée à leur hôtel, où ils nous ont fait goûter au Chacha, de la vodka de canneberge, distillé maison par maman. Couplé au vin blanc local, le cocktail est explosif, on ne sait plus trop quelle langue parler au tour de la table. La tradition russe est elle, qu'il faut finir les bouteilles avant de partir de coucher, autant vous dire que le réveil s'est fait avec une barre dans le front. Nous passons une seconde journée avec nos Russes, au programme baignade à la cascade découverte la veille, randonnée en 4x4 et demi-finale de la coupe du monde dans les montagnes, sur un Mac prêtée par la gérante de l'hôtel, auquel nous convions deux Slovaques curieux. La France gagne et nous faisons les coqs devant Peter qui avait misé sur la Belgique en début de match ! Nous quittons nos Russes que nous serons amenés par la suite à revoir quelques jours après sur la route, par pur hasard.


Nous reprenons notre chemin à la découverte des monastères et églises orthodoxes de la région. Les chants des muezzins ont laissé placer depuis quelques jours à une mélodie énergique de cloches joyeuses. On avoue avoir été un peu déçu par tous les monastères et églises. Bien que certains classés à l'UNESCO étaient incroyablement bien restaurés et d'autres étonnants par leur inaccessibilité et environnement, ils étaient fades face à l'exubérance des mosquées visitées quelques semaines auparavant. Il faut dire aussi qu'à ce stade du voyage ont besoin de se sentir dépaysé et que ces églises nous rappellent simplement celles de Saint-Jean de vignes et Chambray-lès-Tours. Des endroits nous ont cependant laissé bouche bée.



Nous reprenons notre chemin à la découverte des monastères et églises orthodoxes de la région. Les chants des muezzins ont laissé place depuis quelques jours à une mélodie énergique de cloches joyeuses. On avoue avoir été un peu déçu par tous les monastères et églises. Bien que certains classés à l'UNESCO étaient incroyablement bien restaurés et d'autres étonnants par leur inaccessibilité et environnement, ils étaient fades face à l'exubérance des mosquées visitées quelques semaines auparavant. Il faut dire aussi qu'à ce stade du voyage ont besoin de se sentir dépaysé et que ces églises nous rappellent simplement celles de Saint-Jean de vignes et Chambray-lès-Tours. Des endroits nous ont cependant laissé bouche bée. C'est le cas de Vardzia, une ville troglodyte construite comme une fourmilière dans la falaise. Le cadre est digne du seigneur des anneaux, la lumière est superbe. De là, nous prenons la route pour la capitale, Tbilissi. Des passages de la "route" sont désastreux, mais nous traversons des paysages incroyables. On voudrait que ça ne s'arrête jamais. Ce sont des vallons montagneux recouverts d'une herbe grasse à perte de vue. Des lacs viennent couper ces perspectives majestueuses. Tbilissi est une ville moderne et dynamique en rupture avec le pays. Des bars et endroits branchés poussent comme des champignons dans la capitale. Nous assistons à la victoire de l'équipe de France dans une salle pro croate, pas excitée pour un sou, dans des conditions épiques : télé installée pendant la Marseillaise et connexion interrompue dans les dernières minutes de la fin ! La capitale est tout en contraste, les architectes ont l'air d'avoir eu carte blanche. Certains bâtiments sont ultras modernes quoi que bien intégrés dans des éléments plus anciens existants. Tout est à taille humaine et nous faisons le tour de la ville à pied du vieux centre à la brocante en plein air jusqu'au lieu underground branché pour boire un verre. On n'oubliera pas cette soirée dans les entrailles du stade, bien glauque, bien sonore, bien berlinois.


Nous entrecoupons notre séjour à Tbilissi pour aller faire un tour dans la région des vins en Kakéthie. Deux jours à vadrouiller entre les vignes et les dégustations. Parfois, c'était très sympa et on y est revenu comme dans le domaine Shumi. Parfois, il faut l'avouer, personne n'était là, ou le texte débité sans forme et la prestation vite expédiée ne nous ferons rien acheter. De retour à Tbilissi, nous réceptionnons après quelques jours les nouvelles pièces pour notre Jeannot et profitons pour revoir nos amis allemands Luc et Luis voyageant dans un camion Mercedes comme le nôtre, avec qui nous avons partagé à la fois une amitié et un bâche anti-pluie.  Puis nous nous sommes lancés dans un go fast jusqu'à la frontière. Ni les vaches couchées sur la route, ni les chiens mangeurs de roues, ni les cochons promenant leur lard ni les ânes, chevaux ou oies traînant la patte entre deux voies n'ont pu freiner notre envie de prendre le large vers l'Azerbaïdjan.



On finira cet article par une pensée particulière à un être aimé qui nous a quitté. Il a été difficile de prendre la décision de poursuivre le voyage et de ne pas rentrer pour un dernier aurevoir auprès de la famille. On voulait lui dédier cet article, mais aussi ce voyage. À un grand-père, un père, un mari, un voyageur, qui a traversé les mers par amour et provoqué son destin, qui a aimé et été aimé en retour, et qui est parti en paix. Pour lui aussi, le voyage continue.